Au carrefour de l'informatique et de la finance, SET est le révélateur
d'un conflit d'intérêt entre les deux professions. Les choix
techniques SET témoignent de la volonté de leurs promoteurs de ne
pas jouer le jeu de la guerre des standards. Ce sont des choix pragmatiques, réalisables
à court terme avec les outils existants.
En se faisant concurrence
sur des standards informatiques, les grands fournisseurs de cartes risquaient en
effet de retrouver otages de leurs fournisseurs. Elles auraient fait les frais
d'un nouveau bras de fer entre Microsoft
et ses concurrents (Netscape et IBM essentiellement) pour
finir par offrir au vainqueur un monopole sur un plateau. Celui-ci aurait eu
ensuite tout loisir pour phagocyter son partenaire en développant son
propre service de cartes. Le marché est considérable: En 1994,
Visa, chef de file mondial, a diffusé 391 millions de cartes et chèques
de voyages dans 247 pays. Les paiements représentaient US$ 643 milliards,
ce qui représente la moitié du marché total.
L'établissement d'une norme immédiate écarte définitivement tout enjeu de standard informatique et accélère la transition, donc le retour sur investissement.
La faiblesse de SET est qu'il s'agit d'un système à usage unique (paiement par carte). Le système ne permet pas de modifier le scénario ni d'y introduire de nouveaux intervenants. Cette caractéristique fait l'affaire des financiers. Les systèmes proposés par les informaticiens optent naturellement pour des transports sécurisés, ce qui élargit le champ d'applications. Le procédé S-HTTP présente d'ailleurs bien des séductions, dans un univers informatique où le navigateur Web est en passe de devenir l'interface universelle. La mise en place ne sera pas immédiate, mais les applications devraient se multiplier. S-HTTP est adapté pour pouvoir intégrer « en cours de route » de nouveaux protocoles d'utilisation. Les perspectives de SSL sont moins claires, car elles visent un champ d'applications encore plus vaste, qui déborde du Web.
On a beaucoup écrit l'an dernier au sujet des intentions de Microsoft
dans le domaine financier. Le plan qui se dessinait, visait à
imposer dans la foulée de l'introduction très médiatisée
de Windows 95¸ le réseau MSN (Microsoft Network) en
tant que réseau à valeur ajoutée et des standards propriétaires
de transactions financières inclus dans Microsoft Money.
Il
semble que le beau rêve des « Gates Bills
» se soit envolé avec le développement indomptable
de l'Internet et le refus unanime opposé par les acteurs de
l'informatique et de la finance. Même Visa qui a un moment fait
alliance avec le diable au sein du consortium STT, a finalement rallié le
reste du monde.
Le plan de Microsoft de s'imposer comme intermédiaire
obligé des transactions financières électronique en tirant
profit de son quasi-monopole sur les logiciels de base s'est évanoui avec
l'initiative SET. Ce n'est peut être que partie remise, car SET aura sans
doute une durée de vie limitée.
Références: [Wired 1995 ], [Web Week].
Le secteur de la monnaie électronique vit actuellement un paradoxe.
C'est le seul domaine du paiement électronique où des réalisations
sont à l'oeuvre, mais c'est également celui où il y a le
plus de flou du point de vue technique. Les réalisations actuelles telles
celles de Mondex en Grande Bretagne ont dépassé le stade
de prototype. Tout le monde y va de son expérimentation aussi bien en
Europe, qu'au Japon et aux États Unis (projet pilote à Manhattan).
Cependant, aucun consensus ne se dégage sur des normes, ce qui
pourrait coûter très cher à la longue. Le consortium Européen
Café proposera bientôt son approche. On peut douter qu'elle
satisfasse les américains, qui souhaitent combler un certain retard dans
le domaine.
Références: [W3C] donne la liste de tout ce qui se fait en la matière.
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